OK, c’est super ringard de parler en France de sa vie spirituelle ! OK, c’est encore plus douteux de prétendre avoir eu un Maître.

Comme si on s’était compromis dans un exercice illégal de l’amour humain ! Alors c’est encore pire, si je vous dis combien c’est grand, combien c’est magnifique, combien c’est Essentiel d’apprendre à être élève. Oh, bon sang, je vais risquer l’anathème avec une telle confidence : Bernard Montaud est un illuminé, un new-âge, un hystérique… voilà bien ce que j’entends siffler autour de mes oreilles depuis tant d’années !

Et pourtant, se peut-il que cela soit seulement un étage supplémentaire dans les expériences amoureuses humaines ? Un étage au-dessus de tous nos amours terrestres, nos amours avec maman, papa puis nos conjoints. Un étage au-dessous de tous nos amours mystiques, de tous nos amours célestes, avec l’ange, avec le Christ ou avec Dieu. Et s’il s’agissait d’un amour intermédiaire ? Et si cet amour pour un maître spirituel au-dehors conduisait tout naturellement à un autre amour pour un maître spirituel intérieur : l’ange, le kami, le « maître intérieur » comme disait Gitta, ou plus simplement notre intuition géniale, notre inspiration créatrice ? Alors l’amour avec un maître spirituel serait en quelque sorte le dernier amour terrestre et en même temps le premier amour mystique.

Bon, c’est sûr, il y a des risques de dérives sectaires, des risques de mauvais Maîtres, des risques d’abus en tout genre !

Mais pas plus que dans tous les autres amours. Il y a toujours un risque de se perdre dans tous nos amours, pour pouvoir vraiment savourer le bonheur de se trouver, de se retrouver grâce à l’autre. Il ne peut pas y avoir de victoire possible sans le risque de l’échec. Il ne peut pas y avoir de couple spirituel vrai sans le risque du couple sectaire faux. Arrêtons cet infantile discours contre le vilain gourou, tant il faut toujours prendre le risque du gourou pour apprendre ensuite le discernement entre le vilain et le gentil.

Un jour, quelque part sur terre, j’ai ouvert une porte et je me suis retrouvé nez à nez avec une vielle femme dont je suis devenu fou amoureux en quelques secondes. Comment expliquer une chose pareille ? Moi-même j’en étais dérouté. En quelques minutes, j’ai été tellement subjugué par cette beauté humaine intérieure que j’ai su immédiatement que je consacrerais ma vie à cette femme et à son enseignement. Mais où prend-on de telles certitudes ? Car c’est bien de cela qu’il s’agit :

le Maître, on le reconnaît et non pas on le découvre. Quelque chose en nous l’a cherché toute notre vie, sans même qu’on le sache vraiment.

Et voilà que soudain on est au rendez-vous d’une tout autre dimension amoureuse, plus forte que toute logique, plus forte que toute intelligence. Contre toute attente on explose de bonheur, de certitudes inexplicables, de convictions inébranlables, alors que cela fait seulement quelques dizaines de minutes que l’on a croisé cette personne. OK, j’ai dû être fou, totalement fou ! Mais trente ans plus tard, je ne regrette toujours pas cet instant inoubliable et les décisions qu’il m’a fait prendre. Trente ans plus tard, j’ai bel et bien consacré toute ma vie à cet enseignement et à Gitta Mallasz, mon Maître (même si elle détestait ce genre de terminologie « Maître-élève »).

Et que puis-je vous dire d’autre, sinon que cette rencontre fut décisive dans ma vie, la chamboulant tout entière dans tous les secteurs de mes activités,

m’invitant bientôt à choisir une tout autre existence de service et d’aide à autrui que je n’aurais jamais pu envisager auparavant. Gitta était tout simplement pleine exactement là où j’étais vide. Et la sauce a bien pris entre nous deux ! Tant j’ai eu besoin pour lui plaire de lui ressembler… comme dans tous nos amours d’ailleurs ! Tant j’ai eu besoin de découvrir le meilleur de moi-même, seulement pour la garder. C’est cela, être élève : apprendre à rejoindre le meilleur de soi grâce au Maître, seulement pour le garder. C’est vraiment cela, tout l’enjeu de cet amour furieux : apprendre à être meilleur pour rester auprès du meilleur de l’humain que représente ce fameux Maître. Et si au passage, durant cet amour, on apprenait seulement à fréquenter le meilleur de soi, qui pourrait bien y trouver à redire ?

Être élève, c’est une tout autre façon d’envisager l’existence, comme une sorte de chevalerie projetée dans la modernité.

Être élève, c’est une tout autre façon d’aimer, aimer soi-même, le Maître, les autres et ensuite le monde. Comme s’il s’agissait d’apprendre à aimer le pire de soi-même pour être capable ensuite d’aimer le pire du Maître, le pire des autres et le pire du monde. Être élève, c’est un tout autre besoin de Vérité, un tout autre besoin d’intensité de l’existence, une tout autre fidélité conduisant à une noblesse d’âme que seule cette expérience peut nous offrir.

C’est un peu facile de se moquer sans cesse de cette aventure magnifique, en la comparant toujours à l’odieux couple entre un gourou pervers et son stupide disciple. Car apprendre à être l’élève d’un Maître,

c’est selon moi une sorte de voie royale qui pourrait conduire chacun vers le meilleur de lui-même, et ainsi permettre à l’espèce humaine tout entière sa grande mutation intérieure produisant la suite de la vie sur terre.

Se peut-il qu’il existe une vie spirituelle sans Maître, sans mentor ? J’en doute, tant il y a des passages difficiles que seul un Maître peut nous faire passer, et que seulement au nom de cet amour incroyable on a la force de passer. Peut-on vraiment grandir spirituellement sans cette aventure auprès d’un Maître ? Sans doute toute une partie du chemin est-elle possible, mais il viendra toujours l’heure des grands rendez-vous avec soi-même où il est impossible de passer tout seul, impossible de se dépasser sans l’amour du Maître !

Alors, « savoir être élève », ce n’est pas une mince affaire pour tous ceux qui veulent grandir intérieurement.

Et trente ans après ce grand amour qui a tant envahi ma vie, je suis encore abasourdi de l’existence que cette aventure m’a fait mener. Encore abasourdi de la qualité des gens que j’ai alors croisés sans cesse, encore abasourdi du monde dans lequel j’ai vécu. Comme s’il existait des humains et un monde « juste à côté », comme s’il y avait le monde et les hommes tels que nous les connaissons, et un tout autre monde et de tout autres Hommes que nous ne pouvons rencontrer qu’avec le meilleur de soi-même. Alors il faut être bien clair : être élève, c’est vraiment pour apprendre à vivre dans le monde « juste à côté » ; être élève, c’est entrer dans sa propre légende et vivre alors une existence imprévue, une tout autre existence, comme un détournement de destin !

Puissiez-vous tous rencontrer vos Maîtres pour vérifier ce que je vous raconte… surtout ne me croyez pas sur parole : VÉRIFIEZ !